Le Grand Orient de Suisse signe la Déclaration Universelle des Droits de l’Humanité (DUDH)
Le 13 mai 2025, à l’occasion du 10e anniversaire de la Déclaration Universelle des Droits de l’Humanité, le Grand Orient de Suisse a officiellement signé ce texte fondateur, lors d’une conférence internationale organisée dans les locaux de l’Organisation des Nations Unies à Genève. La signature a été apposée par notre Très Respectable Grand Maître, Christophe Ravel, marquant une étape importante pour notre obédience dans son engagement éthique, humaniste et environnemental. Le Grand Orient de Suisse est de fait la première obédience maçonnique à signer cette déclaration.
Un texte visionnaire pour une époque de bouleversements
Proclamée pour la première fois en 2015, cette Déclaration unique par sa portée rassemble quatre principes fondamentaux :
- La responsabilité
- La dignité
- L’équité intergénérationnelle
- La pérennité du vivant
Elle énonce également six droits :
- Le droit à un environnement sain, écologiquement soutenable et favorable à la santé. Chaque être humain a le droit de vivre dans un environnement préservé, équilibré et propice à sa santé et à son développement.
- Le droit au développement responsable, équitable, solidaire et durable. L’humanité doit pouvoir poursuivre un développement qui respecte les limites de la planète et favorise la justice sociale.
- Le droit à la protection du climat. Ce droit implique la réduction des émissions de gaz à effet de serre et l’adaptation aux changements climatiques.
- Le droit à la préservation des biens communs mondiaux. Il s’agit de protéger l’air, l’eau, les forêts, les océans, les pôles, la biodiversité et les autres ressources partagées de la Terre.
- Le droit à la sécurité alimentaire et à l’accès à l’eau potable. Chaque être humain doit avoir accès à une alimentation suffisante, saine et durable, ainsi qu’à une eau propre.
- Le droit à la paix, à la dignité et à la justice pour les générations présentes et futures. La paix est considérée comme un socle nécessaire à la réalisation des autres droits.
Mais elle énonce aussi six devoirs :
- Le devoir de prendre soin de la planète et de tous les êtres vivants. L’humanité a la responsabilité de préserver les équilibres écologiques et de respecter le vivant dans sa diversité.
- Le devoir de prévenir les atteintes graves à l’environnement et aux générations futures. Les décisions d’aujourd’hui ne doivent pas compromettre la vie des générations à venir.
- Le devoir d’assurer un usage responsable, équitable et durable des ressources naturelles. Ce devoir implique la gestion raisonnée des ressources, sans surexploitation ni gaspillage.
- Le devoir de promouvoir un développement soutenable fondé sur la solidarité et la sobriété. La justice entre les peuples et les générations doit guider nos choix économiques et sociaux.
- Le devoir de garantir l’accès universel aux biens essentiels : eau, alimentation, santé, éducation. Cela relève d’une exigence éthique, fondée sur l’égalité de dignité entre les êtres humains.
- Le devoir d’éduquer, de transmettre et d’agir pour la conscience écologique universelle. L’éducation et la mobilisation collective sont indispensables à la transition écologique et sociale.
Cette Déclaration propose ainsi un équilibre rare dans les grandes déclarations internationales, ce qui, selon le politologue et spécialiste des questions d’environnement François Gemenne, que nous avions reçu pour une conférence au sein du Grand Orient de Suisse l’année dernière, en fait un texte fondateur de l’anthropocène, cette ère où l’activité humaine est devenue la principale force géologique affectant la planète. Ce texte ne parle pas seulement de notre époque, il s’adresse aussi à celles et ceux qui viendront après nous. Il est un hymne à la transmission et un appel à la responsabilité collective – des valeurs que nous, francs-maçons et humanistes, plaçons au cœur de notre engagement.
La Déclaration universelle des droits de l’humanité prolonge la Déclaration universelle des droits de l’homme, en se tenant à la jonction entre l’éthique et le droit. Elle célèbre la relation entre l’humain et le vivant, reconnaît aux espèces non humaines le droit à un environnement sain, et consacre la gestion des biens communs comme un impératif universel.
Elle traite non seulement d’écologie, mais de sécurité humaine, de soutenabilité, de justice intergénérationnelle, autant de notions essentielles à un temps où la définition même du progrès mérite d’être réinterrogée.
Dans un monde confronté à l’aggravation des crises climatiques, à la menace sur la sécurité alimentaire, à la disparition accélérée de la biodiversité, il ne s’agit plus de simples constats, mais d’une urgence vitale. La Déclaration doit devenir un outil d’action pour préserver l’avenir de l’humanité. Elle peut – et doit – servir de base juridique en matière de droit de l’environnement, et son objectif ultime est sa reconnaissance par l’Assemblée générale des Nations Unies.
Jusqu’à cette signature, la franc-maçonnerie institutionnelle était absente de ce mouvement. Le Grand Orient de Suisse est désormais la première obédience maçonnique à s’engager officiellement dans cette voie, ouvrant la voie aux autres obédiences amies.
Notre institution a souvent été un phare de réflexion et de progrès dans l’histoire, mais il faut reconnaître que, sur le front de l’environnement, nous n’avons pas été à la hauteur de nos principes. Trop peu de nos frères et sœurs ont intégré dans leur quotidien les changements pourtant nécessaires face à l’effondrement en cours. L’heure n’est plus à la méditation seule, mais à l’action éclairée.
Nous devons assumer nos responsabilités, signer cette Déclaration à titre individuel, et porter cette parole forte dans nos loges, dans la société civile, et auprès des responsables politiques. L’inertie des gouvernements, souvent prisonniers d’agendas électoraux à court terme, ne peut être combattue qu’avec la mobilisation consciente et informée des citoyens.
On dit souvent que la planète est en danger. C’est faux. En vérité, la planète nous survivra. C’est l’humanité, dans sa fragilité, qui risque l’effondrement. Il ne s’agit plus uniquement d’un dérèglement climatique, mais d’un effondrement global de la faune, de la flore, des équilibres écosystémiques. L’anéantissement de notre environnement est une mise en danger directe de notre survie collective.
Dernièrement un biologiste de renom me tenait ces propos : « La sixième extinction est en marche. La seule chose que nous devrions faire, c’est un rétropédalage immédiat, une décroissance rapide et massive signifiant moins consommer, moins utiliser d’énergie, ne plus rien gaspiller, réduire massivement les inégalités, manger moins de viande, ne plus voyager en avion, stopper la vente des SUV, arrêter l’aviation privée, arrêter d’utiliser l’IA qui consomme une énergie folle, arrêter les pesticides qui tuent la vie et complètement reconvertir l’agriculture en bio, arrêter d’importer du soja d’Amérique du Sud pour sustenter un cheptel beaucoup trop important (demande de viande trop importante), arrêter l’industrie de la viande, arrêter l’extractivisme, etc. Je pourrais continuer comme cela sur plusieurs pages. Quant aux pandémies, si tu as lu le livre de Marie-Monique Robin, tu dois maintenant savoir ce qui nous attend à l’avenir. Nous devrions toutes et tous être dans la rue. Nous savons et nous ne faisons rien. Business as usual. »
Nous pouvons à ces propos mesurer l’immensité de la tâche qui est devant nous et des efforts de transformation que nous devrions entreprendre… Souvenons-nous de celui qui a coupé le dernier arbre sur l’île de Pâques. Avait-il reçu des avertissements ? Bien sûr. Mais comme aujourd’hui, l’individualisme, l’avidité, la compétition, l’ignorance auront empêché cette société d’agir à temps.
Le Grand Orient de Suisse prend sa part, aujourd’hui, dans cet engagement fondamental. Il entend informer, mobiliser, dialoguer avec les autres obédiences pour les appeler à rejoindre ce mouvement et informer nos sociétés civiles. Car il ne s’agit pas d’un combat politique, ni même simplement écologique : il s’agit de civilisation.
Cette Déclaration ne doit pas être un énième document sans effet, destiné à nous donner bonne conscience tout en continuant à détruire, ravager et piller notre planète. Cette Déclaration est notre nouvel outil. Utilisons-le en conscience pour changer notre trajectoire commune.
En fraternité,
Christophe Ravel
Grand Maître du Grand Orient de Suisse
Annexe : Informations transmises par le Grand Orient de Suisse a l’AME (Alliance Maçonnique Européenne)